J'ai de plus en
plus peur de mon père. Il le sent. Il le sait.
J'ai tellement
besoin de ma mère, mais comment faire pour lui parler ? Et que lui dire ?
Que je trouve le
comportement de mon père bizarre ? Je me tais.
Un soir, à Tarbes,
mon univers bascule dans l'horreur. J'ai dix ans et demi.
Les enfants se
taisent parce qu'on refuse de les croire.
Parce qu'on les
soupçonne d'affabuler.
Parce qu'ils ont
honte et qu'ils se sentent coupables. Parce qu'ils ont peur.
Parce qu'ils
croient qu'ils sont les seuls au monde avec leur terrible secret.
De ces humiliations infligées à l'enfance, de ces hautes
turbulences, de ces descentes au fond du fond, j'ai toujours resurgi. Sûr, il
m'a fallu un sacré goût de vivre, une sacrée envie d'être heureuse, une sacrée
volonté d'atteindre le plaisir dans les bras d'un homme, pour me sentir un jour
purifiée de tout, longtemps après.
Philippe Grimbert (2004), écrivain et psychanalyste a fait
une interprétation de L’Aigle noir :
L’impair d’un père. Comme avant est une répétition
magnifique qui veut dire comme avant un traumatisme et elle veut effacer
l’acte. Cette chanson nous parle confusément à l’inconscient.
Barbara, Il était un
piano noir... Mémoires interrompus, Fayard, 1998, p. 25.
Grimbert, Philippe, Psychanalyse
de la chanson, Hachette, 2004.
Un beau jour, ou peut-être une nuit,Près d'un lac je m'étais endormie,
Quand soudain, semblant crever le ciel,
Et venant de nulle part,
Surgit un aigle noir,
Lentement, les ailes déployées,
Lentement, je le vis tournoyer,
Près de moi, dans un bruissement d'ailes,
Comme tombé du ciel,
L'oiseau vint se poser,
Il avait les yeux couleur rubis,
Et des plumes couleur de la nuit,
A son front brillant de mille feux,
L'oiseau roi couronné,
Portait un diamant bleu,
De son bec il a touché ma joue,
Dans ma main il a glissé son cou,
C'est alors que je l'ai reconnu,
Surgissant du passé,
Il m'était revenu,
Dis l'oiseau, ô dis, emmène-moi,
Retournons au pays d'autrefois,
Comme avant, dans mes rêves d'enfant,
Pour cueillir en tremblant,
Des étoiles, des étoiles,
Comme avant, dans mes rêves d'enfant,
Comme avant, sur un nuage blanc,
Comme avant, allumer le soleil,
Etre faiseur de pluie,
Et faire des merveilles,
L'aigle noir dans un bruissement d'ailes,
Prit son vol pour regagner le ciel,
Quatre plumes couleur de la nuit
Une larme ou peut-être un rubis
J'avais froid, il ne me restait rien
L'oiseau m'avait laissée
Seule avec mon chagrin
Un beau jour, ou peut-être une nuit,
Près d'un lac, je m'étais endormie,
Quand soudain, semblant crever le ciel,
Et venant de nulle part,
Surgit un aigle noir,
Un beau jour, une nuit,
Près d'un lac, endormie,
Quand soudain,
Il venait de nulle part,
Il surgit, l'aigle noir...